Plongée à -60 formation N3 France

La plongée à 60 m est-elle un passage obligé pour valider le N3 ?

La plongée à 60 mètres fait-elle réellement partie intégrante de la formation N3 en plongée sous-marine ? 
Pour beaucoup de plongeurs et plongeuses formés en France, cette immersion profonde semble être une tradition incontournable, presque un passage obligé pour valider son Niveau 3.

Pourtant, derrière cette fameuse “plongée à -60”, se cache une pratique qui interroge, inquiète… et parfois agace.

Manque de progressivité, risques mal évalués, pression sociale ou pédagogique… la plongée loisir à -60 mètres (à l’air bien sûr) dans le cadre du N3 mérite qu’on s’y attarde sérieusement.

Aussi, en tant que monitrice et formatrice, j’ai décidé de questionner cette tradition.
Spoiler : je pense que c’est une erreur de la faire !
Explication dans cet article 👇

🔍 Pourquoi la plongée à 60 mètres fait débat dans la formation N3

Une tradition bien ancrée dans la plongée française

Il y a quelque temps, un ami me racontait fièrement son passage du Niveau 3.

À la fin de son récit, il ajouta presque machinalement : « Et puis il y a eu la traditionnelle plongée à -60 m. »

Cette phrase a résonné étrangement en moi. Pourquoi cette plongée semble-t-elle incontournable ?
Agacée, je suis partie dans une explication de mon point de vue sur la question, avant de me rendre compte qu’il valait mieux en faire un article.
(Et qu’en plus, je gâchais, sans m’en rendre compte, sa joie 🫣)

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Une immersion sans progressivité

Dans de nombreux cas, les élèves futurs N3 passent d’une profondeur maximale de -40 mètres à une plongée à -60 mètres en une seule plongée, généralement à la fin de la formation. Ce saut brutal ne respecte aucun principe de progressivité.

C’est sans doute pour cela que je trouve cette immersion inappropriée.

Un enjeu plus symbolique que pédagogique

Plonger à -60 m est devenu une sorte de rite de passage, parfois vécu comme un gage de compétence. Pourtant, il ne s’agit souvent que d’une plongée “pour la faire”, sans réelle valeur pédagogique ni bénéfice en termes d’apprentissage durable.

⚠️ Les risques réels d’une plongée à 60 mètres au N3

Narcose, décompression, mauvaise gestion des gaz

Plus la profondeur augmente, plus les risques sont importants.

La narcose peut apparaître subitement, rendant le plongeur confus ou euphorique sans qu’il en soit conscient.
Les paliers de décompression obligatoires arrivent vite, et la gestion des gaz devient plus complexe.

Un faux sentiment d’autonomie à -60 m

Effectuer une seule plongée à cette profondeur, encadré par un moniteur, ne signifie en rien qu’on est capable d’évoluer en sécurité à -60 m en autonomie. Et pourtant, c’est souvent ce que les nouveaux brevetés croient.

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Témoignages de plongeurs en difficulté

J’ai reçu de nombreux témoignages de plongeurs et plongeuses qui, après leur N3, ont vécu des plongées à -60 m comme des expériences stressantes, voire traumatisantes.
Certains ont même développé une appréhension durable vis-à-vis des plongées profondes.

Souvent, cela vient du fait que la personne voit soudain les paliers obligatoires s’accumuler et ne gère pas la partie mentale de l’immersion. Pas parce qu’elle n’est pas douée ou suffisamment calme. Non.
C’est plus simplement parce qu’en passant de -40 à -60 en une plongée, elle n’a pas bénéficié de progressivité. Elle n’est pas habituée à ce nouvel environnement. Et, pas de chance, c’est justement la zone la plus saturante et qui présente les plus gros risques.

Ceux et celles qui veulent plonger avec plus de sérénité auront tout intérêt à lire ce livre et/ou suivre cette formation.

🎓 Former en sécurité : la nécessité d’une approche progressive

Ce que disent les bonnes pratiques pédagogiques

En pédagogie comme en plongée, la progressivité est une règle d’or. 
Elle vous permet de construire vos compétences étape par étape, de renforcer vos automatismes et de gagner en confiance.

Pourquoi la progressivité renforce la confiance et les compétences

Chaque niveau de difficulté franchi progressivement permet de mieux intégrer les gestes techniques, de comprendre vos limites et d’ajuster vos réactions. À l’inverse, une plongée trop ambitieuse trop tôt peut vous fragiliser.

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L’importance du cadre sécurisé en formation N3

Un encadrant ne devrait jamais se sentir obligé d’emmener un groupe à -60 m “parce que c’est la tradition”. Si un moniteur n’est pas à l’aise au-delà de 40 m, pourquoi devrait-il s’y forcer… avec six élèves à sa charge ?

À ce propos, laissez-moi vous raconter une histoire.

💬 Témoignage : “Moi, au moins, je peux aller à -60 m”

Je me souviens de Zacharie.
Je l’ai rencontré lors d’une croisière en France. C’est un plongeur qui chaque année faisait une semaine pour valider un niveau. Le reste du temps, il s’entrainait en piscine. Alors qu’il avait une vingtaine de plongées au compteur, avec son groupe, il venait cette fois valider son N3.

Toute la semaine, ils avaient plongé entre -20 et -40 m pour réaliser leurs exercices. Et puis, le dernier jour, ils ont fait “la fameuse plongée à -60”.

En surface, Zacharie m’a dit fièrement :

« Moi, maintenant, j’ai le droit d’aller à -60 m à l’air. »

Je n’ai pas eu le cœur de lui répondre qu’en Belgique aussi, les gens peuvent plonger à 60 m à l’air, et même au-delà s’ils le souhaitent. Mais à quoi bon, quand ce genre de validation se fait sans vraie préparation ?

Ce soir-là, j’ai parlé avec le moniteur. Il m’a confié qu’il détestait faire ça, qu’il ne se sentait pas bien au-delà de 40 m. Qu’il n’y allait jamais dans ses plongées perso… mais qu’il le faisait “parce que les élèves y tenaient” et que cela faisait partie de la formation.

Alors, faut-il supprimer la plongée à 60 mètres au N3 ?

Je vous rassure tout de suite : loin (très loin) de moi l’idée de vouloir faire interdire quoique ce soit. Je suis bien trop attachée au principe de liberté et à l’éducation à l’autonomie.
Mais j’aime beaucoup réfléchir avec vous.

Une remise en question nécessaire

Cette plongée doit-elle vraiment faire partie du cursus ?
Doit-elle rester une tradition à respecter, même si elle va à l’encontre de tout ce qu’on nous apprend en pédagogie et en sécurité sous-marine ?

Vers une évolution des standards de formation ?

Et si au lieu de cocher une case, on valorisait des parcours individualisés ?
Et si l’on proposait des immersions progressives vers les 45, puis 50, puis 55, puis 60 m, dans des contextes adaptés, et avec des outils de contrôle objectifs ?

Cela pour rendre les plongeurs et plongeuses véritablement autonomes et responsabilisés, pour éviter d’avoir des plongeurs “demeurés” infantilisés.

Bien sûr, vous me direz que cela prend du temps (et donc de l’argent). Et vous aurez raison. Mais à quoi bon effectuer un parcours qui n’a pas de sens ?

Plongée à 60 mètres au N3 : qu’en pensez-vous ?

Même si je n’apprécie pas les plongées profondes à l’air, je ne suis pas contre les plongées profondes.

Je suis contre les plongées profondes faites sans réflexion, sans préparation, et imposées comme une formalité dans un parcours de formation.

Plonger à -60 m, ce n’est pas rien.
Et cela mérite autre chose qu’un simple tampon dans un carnet de plongée

💬 Et vous ? Avez-vous fait cette fameuse plongée à -60 mètres ? Était-ce un moment marquant, une fierté… ou un stress inutile ?


Racontez-moi en commentaire votre expérience.

Et surtout… continuez d’être heureux/heureuse sous l’eau et en surface aussi 😊

Hélène