Plongée et handicap
Plongée et handicap : sous l’eau avec ses différences
Il n’est pas toujours facile de combiner plongée et handicap. Pourtant, ils sont nombreux à donner de leur temps de manière bénévole pour permettre à ceux et celles qui ont des différences de goûter aux joies de l’immersion.
Le monde du handicap est un univers que je connais bien. Aussi, lorsque Claudine, une internaute, m’a contactée pour savoir si j’avais envie d’aborder ce sujet sur mon blog, j’ai bien entendu accepté avec grand plaisir. D’autant qu’elle développe un projet plus que sympa auquel vous pouvez participer et dont je vous parle ci-dessous.
Contre la plongée « Handi »
Avant d’aller plus loin, il me tient à cœur de préciser que je suis contre la plongée « Handi ».
En effet, si ce terme est largement utilisé, il est à mes yeux tout sauf inclusif.
Bien entendu, certains me diront qu’il s’agit d’une question de sémantique.
Et que je ne suis pas toujours aussi pointilleuse sur la sémantique. Vous savez quoi ? Ils auront raison.
Cependant, dès lors qu’un terme renforce l’exclusion d’une personne ou d’un groupe de personnes, il me semble judicieux de le laisser tomber. Ayant travaillé de nombreuses années dans ce secteur, ce sujet me tient tout particulièrement à cœur. Très clairement, définir une personne uniquement par une difficulté ou différence dont elle est porteuse ne me paraît pas relever d’une démarche inclusive. C’est la réduire uniquement à une caractéristique. Alors qu’elle est avant tout une personne avec ses forces et faiblesses. D’ailleurs, le terme « handicapé » est largement connoté négativement et devient parfois une insulte « handicapé ! ».
Ne serait-ce pas mieux d’appeler autrement la possibilité pour les personnes à besoins spécifiques de faire de la plongée ?
Une proposition parmi d’autres
Aussi, même si ce n’est pas non plus parfait, pour concilier plongée et handicap, je préfère la plongée «adaptée» à la plongée «handi». Cela, car la plongée peut être adaptée à de très nombreuses situations (enfants, seniors, personnes porteuses d’un handicap, diabétiques…). C’est donc une démarche plus inclusive.
Je regrette aussi que les personnes à besoins spécifiques ne puissent pas intégrer les mêmes cours que les autres. Bien sur, avec un encadrement plus pointu et adapté. Mais cela demanderait beaucoup plus de moyens. Et justement, c’est souvent ce qui manque, les moyens.
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Bien entendu, cette réflexion que je voulais partager avec vous n’enlève en rien le mérite de l’action positive des nombreux bénévoles. Ces hommes et ces femmes qui œuvrent pour permettre l’accès à la plongée pour toutes et tous. Et cela, quelle que soit la difficulté rencontrée. C’est le cas de Claudine qui partage sa passion avec… passion !
Plonger avec ses différences : oui, mais lesquelles ?
Ma première prise de conscience de la plongée adaptée arriva au travers de Benni.
J’avais rencontré ce jeune homme un mardi dans le cadre d’un projet autour du handicap mental dans l’institution spécialisée où il résidait. Le vendredi suivant, alors que je m’apprête à me mettre à l’eau à la carrière de Floreffe, une voix m’appelle : « Hélène ». Je me retourne et vois Benni prêt à s’immerger lui aussi. Je m’approche et lui demande : « tu vas plonger ??? » (comme s’il était là tout équipé pour regarder 🙈). Avec son grand sourire, il me dit que oui. Qu’il plonge depuis plusieurs années dans ce club. Et qu’il vient tous les 15 jours plonger là en été.
Ainsi donc, les personnes à besoins spécifiques porteuses d’un handicap mental pouvaient elles aussi plonger.
Plongée et handicap mental n’était donc pas incompatible. Si je savais que les personnes à mobilité réduite avaient accès à l’activité, j’ignorais que c’était aussi le cas pour ceux ayant un handicap mental. Et je me surprise à me dire que j’aurais pu m’intéresser à ce sujet bien avant !
Plus tard j’ai eu le plaisir d’initier moi-même une personne en grande difficulté physique et mentale aux joies de la plongée.
En réalité, il y a peu de handicaps qui résistent à la possibilité de découvrir l’univers sous-marin. En effet, si certains se voient contraints à rester sur la terre ferme comme cet enfant qui ne pouvait pas plonger, bien d’autres ont la possibilité de s’initier avec un accompagnement spécifique, à cette activité.
Problèmes de mobilité, handicaps mentaux, autismes… et même cécité !
De nombreuses différences permettent malgré tout de découvrir les merveilles du monde sous-marin et de concilier plongée et handicap. Pourvu que l’on soit vigilant à adapter l’activité.
Plongée et handicap : quels bénéfices ?
Le premier bénéfice est certainement sociétal. Il parle du droit de faire la même chose que les autres quel que soit sa spécificité ou différence. En cela, participer à une activité telle que la plongée, c’est être avec les autres, comme les autres. Et cela participe à la construction d’une société plus inclusive.
Point de vue personnel, la personne à besoin spécifique aura des avantages certains à pratiquer la plongée :
- Bien-être résultant de la sensation d’apesanteur.
- Mobilité accrue et autonomie (plus besoin de fauteuil sous l’eau)
- Renforcement cardio-respiratoire et musculaire
- Gestion du stress et augmentation de la confiance en soi
- Découverte du milieu sous-marin
- Interactions sociales
- …
Les encadrants ne sont pas en reste. Il est réellement très gratifiant de participer à ce type de plongée. Le plaisir de voir cette joie immense dans les yeux des personnes. Leur reconnaissance aussi.
Où plonger ?
La personne à besoins spécifiques doit pouvoir être accueillie partout. Les structures ont le devoir de mettre en place les moyens nécessaires pour pouvoir accueillir tout le monde. Bien entendu, si une surdité ou un handicap mental léger ne demanderont pas d’aménagements trop complexes, il en va autrement pour une personne présentant un handicap moteur et la possibilité de pouvoir lui permettre de se mettre à l’eau. Ou d’un handicap mental lourd demandant un encadrement humain conséquent.
En ce qui concerne les personnes à mobilité réduite (parfois nommées PMR), il est nécessaire pour elles d’avoir des rampes d’accès et/ou fauteuil permettant la mise à l’eau. A la gravière du Fort, des rampes ont été conçues permettant ce type d’accès.
Heureusement, de nombreuses structures se sont adaptées pour permettre de rendre la plongée plus inclusive. C’est le cas notamment de ce club en Martinique où l’accueil de la personne à besoins spécifiques est une évidence depuis de très nombreuses années. Ou de nombreux centres de plongée à l’étranger équipés pour l’accueil des plongeurs et plongeuses à mobilité réduite. Par exemple, le Coraya club de l’hôtel Jaz Lamaya à Marsa Alam où la photo de cet article a été prise, est aimé par les personnes à mobilité réduite qui peuvent accéder à la merveilleuse mer Rouge et pratiquer leur passion.
Avec qui plonger ?
L’encadrement est certainement l’obstacle le plus important à la pratique de la plongée pour une personne à besoin spécifiques.
Les moniteurs doivent être formés aux particularité que demande la conciliation de la plongée et du handicap. Ils doivent connaitre les bonnes pratiques et les bons gestes à avoir. Mais il doivent également pouvoir faire preuve d’empathie et respecter encore plus qu’ailleurs el rythme de l’apprenant en face d’eux.
En effet, il est indispensable que les encadrants qui emmènent les personnes à besoins spécifiques soient non seulement formés aux particularités des différents handicaps, mais également aux solutions et aides à mettre en place.
Cela demande du travail en terme de formation et de l’investissement en temps.
Plongée et handicap : le projet du club « Bulles Rebelles ».
Claudine m’explique que le projet du club associatif « Bulles Rebelles », situé dans l’Essonne en Île de France, consiste à faire découvrir la plongée à des enfants et des adultes en situation de handicap dans des établissements ou structures accueillant ces personnes et ayant des bassins ou piscines de rééducation. D’emblée, le projet me plait.
Pour cela, les bénévoles cherchent à acquérir un camion équipé avec tout le matériel de plongée (compresseur, blocs, stabs, combinaisons, moyens de secours, matériels de désinfection…). Ceci, afin de pouvoir se déplacer directement dans des structures. Et d’éviter le déplacement des personnes et de leurs encadrants.
Le groupe est composé d’encadrants et de moniteurs bénévoles formés à l’encadrement et à la formation de ces plongeurs aux besoins spécifiques. Tout l’enjeu est d’arriver à concilier plongée et handicap sans trop de difficultés.
Dans un premier temps, les membres de Bulles Rebelles prévoient de faire des baptêmes dans les structures ayant adhéré à ce projet en mobilisant des bénévoles pour le transport et l’entretien du matériel mis à leur disposition par les clubs de la région.
Un objectif ambitieux…
L’objectif est de donner envie à ces personnes porteuses d’un handicap de pratiquer de façon régulière une activité dont les nombreux bienfaits sont prouvés. Mais également de pouvoir proposer en fin de formation une sortie en mer chaude. Rien que ça !
Il est reconnu que la plongée apporte beaucoup tant au niveau physique que moral. Alors Claudine et son club Bulles Rebelles ont bien l’intention de mettre la main à la pâte pour apporter ce bien-être aux personnes porteuses d’un handicap.
Les bénévoles de Bulles Rebelles ont un grand rêve : avoir un véhicule autonome avec tout le matériel de plongée et de désinfection à bord. Cela afin que tout soit regroupé en un seul endroit et facile à déplacer afin de satisfaire un grand nombre de personnes.
… qui demande du soutien
Pour concrétiser et mener à bien leur projet facilitant la plongée malgré le handicap, il faut des financements.
Ce pourquoi, ils vous proposent de les aider à finaliser leur projet.
Si cela vous parle, vous pouvez contacter Patrick, le responsable du projet à l’adresse suivante : patrick.borre@free.fr
D’autres possibilités, d’autres opportunités
La démarche de Claudine, Patrick et les autres n’est pas la seule qui veut concilier plongée et handicap. Il existe de multiples possibilités pour les personnes ayant besoin d’un encadrement adapté de découvrir les joies du monde sous-marins.
Cette démarche inclusive n’est ni nouvelle ni exceptionnelle, mais toujours merveilleuse.
Partout dans le monde des initiatives existent.
En France, la FFESSM a fait de Handisub une marque déposée. Elle a publié le Guide Accessibilité qui regorge d’informations pour celles et ceux qui veulent aller plus loin pour concilier plongée et handicap.
En Belgique, certains clubs et structures se sont organisés pour devenir plus inclusifs. C’est le cas notamment de celui qui gère cette jolie carrière.
En Suisse ou au Canada, des personnes sont formées pour répondre aux mieux aux demandes spécifiques de chacun et chacune.
Et c’est comme cela dans bien d’autres pays.
Envie de participer à l’ouverture de la plongée pour toutes et tous ?
Bien entendu, vous pouvez soutenir le projet de Bulles Rebelles décrit plus haut. Vous pouvez également mettre en commentaire de ce post les noms des clubs, centres ou structures que vous connaissez et qui oeuvrent pour rendre la plongée accessible aux personnes porteuses d’un handicap. Ceci pour que chaque personne puisse trouver une structure adaptée à ses besoins proche de chez elle.
Merci d’avance de votre collaboration.
Et surtout… n’oubliez pas d’être heureux/heureuse 🤗
Hélène